L’enfer est au bout de la nuit est un roman noir dont l’intrigue est aussi sombre et complexe que son personnage principal. Par cette victime d’une guerre de succession dans une organisation mafieuse de Glasgow, Malcom Mackay nous livre une tragédie sans la moindre rédemption.
Un polar d’une admirable sécheresse. Aucunement descriptif qui lui permets d’échapper à la couleur local. À cet exotisme de carton-pâte qui frappe souvent le polar. Une façon de se centrer sur l’intrigue qui lui donne un poids tragique. Le lecteur, tant mieux pour lui, ne fera pas de tourisme dans ce qui pourrait paraître une image d’Épinal de Glasgow : ses gangs.
Une petite réserve. Je n’aime pas quand un récit noir change de point de vue pour venir au secours de son intrigue. La plus grande partie de ce roman noir est raconté sous le prisme de Nate. Un cogneur qui se croit intelligent pour que ses aveuglements ménagent le suspens sauf en de pénibles exceptions où Makay laisse la parole à ceux qu’il poursuit. Une béquille que je trouve, sans trop savoir pourquoi, un peu maladroite. Peut-être parce que la description à la troisième personne des nouveaux venus paraît parfois manqué un poil d’âme.
Tout au moins face au portrait, toujours au service d’une intrigue haletante mais sans trop d’artificiels rebondissements. Nate Cogan, cogneur de son état, est au service d’une « organisation » en déliquescence. Le chef au trou, à Balinie et la toponymie suffit à poser une ambiance, les chefaillons se déchirent. Selon la bonne vieille tradition d hard boiled detective, Cogan se fera duper. Toutes les figures attendues sont là : la femme fatale revenue du passé comme une garce manipulatrice, le jeunot en formation à l’avenir justement pressenti funèbre, les remords et la réputation qui enferment Cogan dans son destin.
Sur cet air attendue, à aucun moment L’enfer est au bout de la nuit ne paraît se soumettre, avec des grâces de ballerines ou des contorsions ironiques, aux passages obligés du genre. Une mélodie en mineur qui rappelerait Les harmoniques mais détachée du blues et de ces rengaines lancinantes.
Makay parvient parfaitement à se maintenir à hauteur de son personnage. Une petite frappe qui vit d’intimidations et de passages à tabacs ne saurait être encombré de dilemmes moraux ou des mélancoliques références. Et pourtant, Cogan est toujours sympathique. Bien davantage que Mailman par exemple. Sans le moindre doute par la sentimentalité dont il fait preuve. Elle sera au cœur de l’intrigue, elle fera plonger Nate Cogan dans une sorte de regret amoureux pour la fatale Zara, la mère de sa fille.
C’était une des rares personnes dont j’aie jamais été proche. Proche dans le bon sens du terme, sentimentalement.
Cette femme fatale aurait pû être un poussif recours scénaristique. Malcom Mackay sans s’attarder sur la description de ses motivations ou de sa psychologie en fait un beau personnage, intrigant et fonctionnelle au sein de cette lutte de pouvoir, de cet évident jeu de dupe. Notons aussi que le personnage du flic, décrit juste dans ses actions est lui aussi d’une justesse émouvante.
Une dernière remarque plus anecdotique. Le style de ce roman atteint à une tension minimaliste presque parfaite. Du coup, certaines redondances frappent encore plus durement. Ce type de phrases hélas se répètent : « Pas de place pour déambuler, pour musarder. » Un détail surtout présent dans la première partie.
Les femmes fates, hallent sur un trottoir bien à elles.
N-L
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