Des carillons quand tu meurs Brian Hughes

Nos désirs de voir, d’être vu, d’exister dans l’interprétation, de comprendre dans les suppositions, de nous laisser prendre dans ce complot qui est peut-être (tout est dans cette incertitude habilement maintenue) le fruit de l’imagination débordante de ses hommes dans les limbes, blessés et sachant si bien se mentir à eux-mêmes. Sous les apparences d’un roman d’espionnage, Des carillons quand tu meurs est un roman psychologique d’une grande acuité, le témoignage d’une grande précision sur ce qui, en autrui et en nous-mêmes, nous échappent et nous attirent, sur ce qui nous agite et, sans doute aussi, comment on compose avec nos pertes, comment autrui, à travers ses propres deuils, parvient à en témoigner, trop tard peut-être. Brian Hughes signe ici un roman à tout instant sur notre difficile, émouvant souvent, rapport à l’autre.

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Divorce à l’anglaise Margaret Kennedy

Les liens nés de la séparation, la désunion comme révélateur, trop tard, de ce que l’on est. Dans une atmosphère particulièrement surannée, avec une certaine acidité, tout au moins une froide distance à ses deux protagonistes en plein divorce, Margaret Kennedy met en scène un divorce anglais en 1936, ses répercussions sur chacun des membres d’une famille, les hasards et autres extérieurs manipulations qui nous servent de choix. Divorce à l’anglaise donne pourtant à voir, par petite note, la complexité de nos rapports humains, de nos aspirations et autres idéaux.

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Qu’on leur donne le chaos Kae Tempest

Sept voix dans la nuit, 4h18 à Londres, on est paumé, seul et sans sens : contemporaine colère. Kae Tempest déroule son texte, ses sonorités puissantes, ses collages de pertes et de défonces, d’anéantissements salariales et de fatigues quotidiennes. Qu’on leur donne le chaos pourtant ne cède pas à la résignation : dire ses existences suffirait, qui sait, à restaurer, à inventer, leur capacité d’amour.

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La fin d’une ère Elisabeth Jane Howard

Derniers Noëls à Home Place, l’effondrement d’une entreprise et, en dépit du malheur, la vie qui, dans son obstiné matérialité, dans ses détails si finement restitués, continue. La saga Cazalet, toujours aussi attentive aux ressentis de ses personnages, s’organise autour de la faillite de l’entreprise familiale et sur la manière dont chaque branche parvient à s’inventer autre chose. Toujours avec sa grande précision, dans une élégance virevoltante vue le nombre conséquent de personnage pris en charge, avec une vraie tendresse pour eux jamais aussi patente qu’au moment de les quitter, le roman décrit discrètement une période, celle où les souvenirs des guerres s’estompent, où la reconstruction se fait sur un autre mode, moins dominateur, plus tendre aussi notamment pour les personnages masculins. La fin d’une ère ou des adieux presque joyeux, une transmission possible au monde qui vient.

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Mordew Alex Pheby

La foudre et sa démange, la magie et ses déformations de la Trame, Mordew et les manipulations de son maître. Formidable roman d’aventure, récit initiatique haletant, très souvent teint d’une ironie à la Dickens, réflexion aussi sur les maléfices du pouvoir, telle serait, d’une traite, la première lecture de Mordew. Cependant, Alex Pheby outrepasse le roman d’héroïc-fantasie, le degré matériel de son récit, les aventures de Nathan Treeves qui affronte son destin, les interdictions paternelles, les péripéties des bas-fonds, l’apprentissage de la magie, l’écoute d’un curieux livre animé d’une aide incertaine. Dans ce roman, annoncé comme une trilogie, l’auteur, notamment dans le glossaire qui referme cet ample roman, réfléchit à la perméabilité des univers, à comment l’immatérialité des concepts informe et déforme notre monde matériel. Manière radicale d’inventer un autre monde, une logique autre, dans lequel nous happe Mordew.

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