Aveu de faiblesses Frédéric Viguier

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Aveu de faiblesses se veut un magistral roman noir. Frédéric Viguier n’y montre pourtant ni le pessimisme moqueur ni la noirceur d’un univers social finement, sans condescendance perçu, propre à ce genre. Cet histoire d’un aveu prétendument arraché peine à convaincre. Même si la fatalité attachée à Yvan Gourlet peine à convaincre le prévisible retournement de situation, l’enchaînement de l’emprisonnement et du procès finit par fonctionner.

Déverser le mal que l’on pense de la lecture d’un roman contemporain me demeure un exercice peu agréable. Infliger d’inutiles et prétentieuses blessures à l’auteur me paraît peu productif. Et pourtant… À nouveau je m’y astreins. Sans doute uniquement pour interroger la nécessité de ce livre pour son auteur tant il me semble sans urgence. Peut-être parce que sa dénonciation d’un milieu social (le Nord comme sempiternelle cliché misérabiliste) ne me paraît pas entièrement fonctionner, voire révéler une vision imprécise d’être condescendante. Le personnage de la mère, scultpteuse sur beurre et collectionneuse d’étiquettes de boîtes de camembert est trop excessif pour être véritablement incarnée, la réalité étouffante d’un village rancunier et manipulé me demeure peu crédible pour ne pas dire franchement indifférent. La critique assassine est une facilité. Sa seule chance est de mettre à jours ses ressorts. Pour moi, ici, comme toujours, une lecture hantée par une comparaison toujours défavorable. Sur le même sujet, Pierre Lemaître dans Trois jours et une vie a su mettre en œuvre un roman véritablement populaire, simple, limpide, et surtout issu d’une intime compréhension de la population autochtone.

Cette acerbe sympathie m’a paru faire à tout instant défaut à Frédéric Viguier. Bien sûr, avec la même facilité, la gratuité en sus, que Tristan Garcia ce défaut de point de vue s’excuserait par un narrateur peu fiable, franchement menteur et manipulateur comme nous le paraît le trop simple Yvan dans son lien trop fort à sa mère. En parvenant à oublier ce regard social lacunaire, la prose de Frédéric Viguier finit par nous emporter là où il souhaite. Critique négative trop facile, importante néanmoins car elle me rappelle à la nécessité de trouver ce que chaque lecture m’apporte. Aveu de faiblesses (où joli pluriel) intrigue par cette capacité – sans doute une des plus grandes spécificité du roman noir – à la limitation d’un point de vue à la première personne. De belles ellipses et une façon d’éveiller la sympathie du lecteur pour ce garçon un peu trop simple qui, dans le meurtre, finit malgré tout par s’émanciper, par tuer, à la lettre le père. La vie continue, accuser pas tout à fait à tort (je ne crois rien révéler de l’intrigue tant ce ressort est évident d’emblée), Yvan est libéré, la haine qu’il a suscitée tourne à la sympathie et Viguier se croit à nouveau contraint d’imposer une dénonciation sociale qui manque un peu de précision. Pour rester dans le domaine de ce que m’apporte cette lecture sans doute tôt oublié, un de ses attraits est la difficulté à la dater de ne surtout pas s’accrocher à des marqueurs d’époque.

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