Où les roses ne meurent jamais Gunnar Staalesen

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Le simple plaisir de retrouver Varg Veum, accroché à son Aquavit, de se laisser à nouveau prendre par l’efficacité sans un mot de trop des polars de Gunnar Staalesen. Sans fioriture mais avec un vrai sens de l’observation sociologique et historique, Où les roses ne meurent jamais use de tous les codes du polar pour une lecture des plus appréciables.

Voilà un moment que je ne m’étais pas plongé dans un roman de Gunnar Staalesen. Toujours un immense plaisir de retrouver Varg Veum, son privé et loup dans la bergerie s’il fallait traduire son nom. La quatrième de couverture de cette édition en poche de Où les roses ne meurent jamais portent, pour une fois, une notation assez juste de Jo Nesbo qui qualifie l’auteur du Chandler norvégien. On retrouve de fait ce frappé sec, tendre et désabusé, cette vision enracinée à gauche, de l’auteur du Grand Sommeil. Avec une belle assurance, une maîtrise impressionnante dans sa discrétion, Gunnar Staalsen ne prétend aucunement innové et s’empare des archétypes avec cette humble confiance professionnelle qui fait que le roman, en tout instant, fonctionne. Une trame des plus classiques donc: une enquête sur une disparition d’une petite fille juste avant sa prescription, un hold-up, des témoins réticents et des recoupements fortuits entre ces deux cas, un peu d’humour pour palier à l’horreur de la situation entrevue dans différentes strates sociales.

Vous avez tout l’air d’un moralisateur désespérément suranné.

– Tiens donc. Pas impossible que vous confondiez avec le sociologue qui est en moi.

On tient là les deux ferments du polar. Staalesen transmue Veum en observateur marginal mais pour qui l’impératif moral n’est pas un vain mot. Précisément parce que lui, avec ses problèmes d’alcool et sa situation peu florissante, est loin d’être exemplaire. Les codes classiques du polar font que le regard désabusé se double souvent d’une nostalgie un brin fastidieuse. Varg Veum vieillit, le monde autour de lui ne lui semble pas s’améliorer mais Staalesen s’en amuse plutôt que de vainement le déplorer. Là encore Où les roses ne meurent jamais s’empare d’un autre code cher au polar : une communauté fermée, en permanence sous le regard d’autrui, secrets et autres ressentiments. La fin d’une utopie qui s’embourgeoise et crée des communautés de vie. Un architecte crée un ensemble de maison où mener une existence autrement. La disparition d’une petite fille semble mettre fin à tout ceci. Veum remonte la piste et tombe sur une soirée échangiste. La prétendue émancipation et ses retombées ; les couples se séparent et le polar met à jour ce type de non-dits. Staalesen reste fidèle à lui-même, son personnage est un ancien de la protection de l’enfance, toutes les enquêtes de Veum, me semble-t-il y reviennent : quelles conséquences ont sur les enfants la liberté prétendue de leurs parents. Staalesen ne dit rien de la société laissée ensuite. Il promène juste son personnage dans ses déboires et ça suffit. Surtout qu’il offre un joli rebondissement dans ce roman qui se dévore.



Un grand merci à Folio Gallimard pour cet envoi

Où les roses ne meurent jamais (trad : Alex Fouillet, 385 pages, 8 euros 40)

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