Hollywood s’en va en guerre Oliver Barde-Cabuçon

Hoolywood, 1941, Roosvelt veut mettre en œuvre un film pour infléchir l’opinion publique vers une entrée en guerre des États-Unis. La ligue America First, les isolationistes et autres fachos fascinés par l’Allemagne s’y opposeront de toutes les manières possibles. Vicky Mallone est chargé de veiller sur l’actrice principale. Mais, au cinéma, on le sait, tout est faux-semblant. Hommage à Chandler et Hammett un rien appuyé comme les nombreux parallélismes tracés avec notre époque, Hollywood s’en va en guerre plonge le lecteur dans une enquête rieuse et rythmée, quasi documentaire sur la grandeur du cinéma. Oliver Barde-Cabuçon signe ici un roman divertissant que l’on referme en s’interrogeant sur son usage de la langue.

Faut-il le préciser, j’aime énormément les romans de Raymond Chandler. Toujours une pensée pour l’adaptation hollywoodienne du Grand Sommeil, par Faulker au scénario et Hawks à la réalisation. Ceux bien sûr de Dashiell Hammet, son désir d’écrire un polar avec le moins de mots possibles. Leur commun engagement politique. Passons tant il ne saurait s’agir de se réfugier dans un encombrant âge d’or, dans une pesante nostalgie qui, dans le roman, passerait par une lourdingue reconstitution. Olivier Barde-Cabuçon décide de ne pas s’encombrer d’une exactitude historique, avouons avoir trébuché sur pas mal d’expressions qui nous semblaient non seulement anachroniques, mais ne pas faire preuve d’une folle invention stylistique. Un seul exemple : ne pas avoir le cul sorti des ronces comme s’exclame un des personnages. Nous restons persuader que le polar exprime, à son meilleur, le génie le génie de la comparaison. Ici les dialogues sont pétillants, jamais totalement désespérés ou atteignant la gravité du cynisme, la tendresse de la misanthropie. En se plaçant sous l’égide des maîtres du hard-boiles detectiv, on entend dans Hollywood s’en va en guerre un roman un rien bavard. L’auteur présente un peu lourdement le contexte politique ou social, peine, je trouve à le restituer par ellipses. Il faut bien le dire, le roman pâtit également d’une autre comparaison. Dans ce climat, difficile de ne pas penser à James Ellroy, sa folie stylistique, ses abus aussi, mais sa capacité surtout à se plonger dans le racisme, la misogynie, la violence d’une époque. Plus gentil, Hollywood s’en va en guerre est nettement plus respirable, divertissant. Notons, tout de même, un dernier point qui nous a plus interrogé que gêné. Olivier Barde-Cabuçon invente une détective lesbienne. Avouons nous être interrogé, par instants, si ce choix queer n’était pas un rien opportuniste. Une manière un rien visible de coller à l’air du temps ? Passons.

On pourrait, après tout, penser que ce roman veut inscrire une mise en garde, rappeler la montée du fascisme, ses sympathies internationales et comment aujourd’hui, partout, cela suscite de grises réactualisations. America First, nous en étions encore-là. Antisémitisme généralisé, encouragé par des grands groupes de presse. Les coïncidences avec l’ici et maintenant ne sont pas entièrement fortuites. Au nom du rythme, d’une très grande « facilité à lire » (quoique cela puisse bien vouloir dire), l’auteur garde ouvert en permanence ce parallélisme. Parlons plutôt d’une enquête et d’une intrigue bien menée. Évitons ainsi de trop en dire sur un dénouement d’un double dédoublement gémellaire un rien poussif. Oliver Barde-Cabuçon reprend les codes : Vicky Malonne picole trop, se laisse berner, suit ses intuitions. Elle rencontre, se fait manipuler telle une muleta, par le joli personnage d’Arkel. Malgré mes réticences, disons-le on se laisse prendre. Sans doute ne faut-il pas dévaluer les enthousiasmes des luttes anti-fasciste, ne point trop décrier les plaisirs du romanesque.


Merci à la Série Noire pour l’envoi de ce roman.

Hollywood s’en va en guerre (407 pages, 21 euros)

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