Aorte adorée (se pendre et autres idées géniales quand on s’ennuie le dimanche) Christophe Esnault

Le suicide comme on en rit, les délices de l’humour noir, la préservation de la panique, vécue, dans les provocations de la blague potache, du sérieux du comique macabre. Aorte adorée, 32 brèves situations terminales, autant d’échappatoires, où Christophe Esnault creuse son propre rapport au monde.

Premier défi pour parler de ce livre : ne pas faire plus long que ces trente-deux fragments, versifiés, joliment disposés, dans cette édition brillante. Le charme, onéreux, des livres de trente-deux pages. Sans doute faut-il aussi, pour évoquer avec justesse Aorte adorée donner voix à ses silences, à tout ce qui échappe à la gratuité de la provocation. Un aspect que l’on retrouve souvent chez Christophe Esnault, une certaine intransigeance. Si parfois on se surprend à la qualifier de puérile, ne serait-ce surtout parce que l’on reconnaît – dans les résignations et autres mises à distance – celui qu’on fut. Le suicide et l’hénaurme humour, deux portes de sorties, deux dérivations à l’ordinaire tristesse des jours. Tapies, pas totalement tus, la difficulté d’être, la souffrance psychologique. Sans qu’il ne s’agisse, bien sûr, seulement de celle de Christophe Esnault, de celle si intelligemment, socialement, analysée dans Lettre au recours chimique.

On aime assez comment, indéterminable ironie, l’auteur s’amuse des différents moyens de suicide comme des fictions effleurées dans l’impuissance (ô le dominical ennui…), des dérivatifs aux gestes que l’on ne commet pas. On aime aussi comment Christophe Esnault souligne certains de nos ordinaires suicides : la vie de couple, par défaut, les réseaux sociaux. La hantise du suicide, comme dirait Crevel, comme appel à la vie, rappel à l’intensité que jamais elle ne devrait perdre.



Merci aux éditions Conspiration pour l’envoi de ce livre.

Aorte adorée (se pendre et autres idées géniales quand on s’ennuie le dimanche) (n.p, 7 euros)

Laisser un commentaire